Ecrite en gros caractères, la conclusion du communiqué saute aux yeux : « Il n’y a aucune raison valable pour retarder le commencement de la session de la Commission des droits de l’homme. »

Suite à cette suspension pendant une semaine, trois ONG observant attentivement cette question depuis des années n’ont pas mâché leurs mots. L’Association américaine des juristes (AAJ), le Centre Europe - Tiers Monde (CETIM) et la Ligue internationale pour les droits et la libération des peuples (LIDLIP) se sont joints pour dénoncer ce qu’ils voient comme une ruse pour entraver, voire empêcher, le travail de cet organe.

Elles rappellent le paragraphe 13 du projet de résolution sur la création du Conseil des droits de l’homme, qui recommande « au Conseil économique et social [ECOSOC] de demander à la Commission des droits de l’homme d’achever ses travaux lors de sa 62e session et de procéder à la suppression de la Commission le 16 juin 2006 ».

Violation » de la procédure

En tant qu’organe-parent de la Commission, l’ECOSOC est seul habilité à déroger au programme et à arrêter le travail de celle-ci. La décision des Etats-membres de la Commission constitue donc une violation grave de la procédure. Pis, selon le communiqué, les raisons « techniques » invoquées (telles que le manque de préparation) ne sont qu’un prétexte, surtout que cette préparation incombe au Haut Commissaire aux droits de l’homme dont le secrétariat s’est bien acquitté de son devoir.

Malik Özden du CETIM s’insurge. « Ils veulent attendre ! Et le travail à faire ? Deux des dossiers les plus importants à long terme - le protocole facultatif au Pacte relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, ainsi que les autochtones - risquent bien de s’enliser. Et rien ne dit que la suspension ne sera pas prolongée ! »

En cas de prolongation, selon M. Özden, on risque d’assister à une session « technique » sensiblement raccourcie pendant laquelle la Commission « prend note » des rapports et du travail des rapporteurs, sans pour autant qu’il y ait de débat quelconque, faute de temps.

Escamoter Guantanamo

Le vrai coupable, selon cette triade, c’est la superpuissance qui y voit une manière d’escamoter tout débat sur le récent rapport préliminaire de cinq rapporteurs spéciaux sur la situation à Guantánamo, qui montre les Etats-Unis sous une perspective peu luisante. Les deux dossiers précités sont, eux aussi, loin de plaire à la superpuissance. Derrière cet arrêt, donc, se trouverait la pression du lobbying acharné de Washington.

Enfin, les ONG rappellent l’article 100 de la Charte de l’ONU : « Dans l’accomplissement de leurs devoirs, le Secrétaire général et le personnel ne solliciteront ni n’accepteront d’instructions d’aucun gouvernement ni d’aucune autorité extérieure à l’Organisation. Ils s’abstiendront de tout acte incompatible avec leur situation de fonctionnaires internationaux et ne sont responsables qu’envers l’Organisation. »

URL: CETIM